Photographe professionnel aux Jeux Olympiques le témoignage de Thierry Larret
Thierry Larret, photographe professionnel nous délivre un témoignage intéressant sur son expérience de photographe aux Jeux Olympiques de Londres.
“1er Mai 2011… date de la Dead line pour les accréditations des Jeux Olympiques de Londres. Ma demande d’accréditation a été renvoyée au CNOS. J’attends fébrilement la réponse. Les quotas sont peu nombreux pour la France et la proximité de Londres fait qu’il y aura beaucoup plus de demandes. Et en plus … je suis Freelance.
Le 8 juin 2011, un courrier du CNOS arrive… « Vous avez une accréditation EP ». Je n’ose pourtant pas y croire, je me dis qu’il doit s’agir d’une présélection. Un coup de fil au CNOS me rassure et me confirme que mon accréditation est bien accordée, définitive, et pour tous les sports (EP). Yessss !! Un rêve qui se réalise. Pour un photographe de sports, les Jeux olympiques représentent le graal. Les Jeux sont encore dans un peu plus d’un an et je suis déjà très excité. Je sais que ça va être dur, très dur. Tous les meilleurs photographes de la planète sport seront présents avec des moyens colossaux. Je suis distribué par l’agence Maxppp… qui distribue aussi d’autres agences Européennes et mondiales. Mes photos vont donc se retrouver noyées au milieu d’un flux impressionnant d’images. Je ne m’attends pas à gagner beaucoup d’argent sur les jeux, il me faudra avant tout couvrir et rembourser mes frais, qui sont à ma charge. (Eurostar, hébergement, nourriture, connexion internet, voila de quoi bien entamer un budget). Je me fixe comme objectif d’en profiter un maximum et de ne pas me mettre de pression, tout en n’oubliant pas que je ne suis pas en vacances et que je suis professionnel. 27 juillet 2012, je quitte l’Auvergne pour la capitale et quelques heures plus tard, me voilà à Londres. Déjà la Gare de Saint Pancras bouillonne.
Des policiers, des militaires, des bénévoles sont omni présents et accueillants. Me voila à l’entrée du village Olympique, où tout commence par un passage des bagages au scan avec inspection minutieuse par les militaires. Il en sera de même tous les jours et même plusieurs fois par jour, à chaque entrée sur les différents sites de compétition. Après avoir récupéré mon accréditation, direction le Main Press Center. C’est immense ! Chaque photographe doit porter un gilet photo numéroté durant toutes les compétitions. Je récupère le miens, le numéro 1895 est dans la place !! Direction l’assistance Pro Canon, histoire de faire nettoyer les capteurs de mon Mark IV et de mon 7D. En échange, Canon me prête un autre Mark IV et surtout le nouveau DX, dont j’avais pu lire sur le net et dans la presse qu’il s’annonçait plus que prometteur. Apres l’échec du Mark III, Canon n’avait aucun droit à l’erreur. Durant les 15 jours des JO, j’ai pu garder le DX, un pur bonheur. Je n’ai pas pu (pas voulu…) tester toutes ses possibilités. Il n’est pas évident de prendre un boitier nouveau pour des reportages qui plus est au JO, et j’ai fait le choix de ne pas l’exploiter à fond voulant jouer la carte de la sécurité. Ce boitier m’a (enfin) réconcilié avec Canon et surtout avec son autofocus. Ce DX est une tuerie, surtout associé aux optiques récentes. Les 300, 400 500 mn sont beaucoup plus légers. J’ai aussi eu l’occasion d’utiliser plusieurs jours le 200/400 avec l’extendeur intégré (il y avait peu d’exemplaires à Londres). C’est énorme !!! Cet optique est excellente et offre énormément de polyvalence notamment sur les JO, où l’on ne peut quasiment pas se déplacer. Associé au DX, c’est l’arme fatale !! Le prix, pas encore annoncé devrait être lui aussi fatal … j’ai également pu tester le nouveau 5D Mark III. Je l’ai peu utilisé car je l’avais en 3ème boitier quelques jours. Je pense qu’il va très vite remplacer mon 7D… si je vends celui-ci rapidement.
En tout cas l’assistance Canon Pro sur les grands événements est très appréciable et incroyablement réactive. La quantité de matériel de prêt est impressionnante, tout comme le nombre de DX qui ont pu circuler durant cette quinzaine. Les jeux, c’est de nombreuses heures de bus pour se rendre sur les différents sites de compétitions, de nombreuses heures d’attentes sur place, des repas sur le pouce et à des heures improbables et surtout peu d’heures de sommeil. Ma plus grosse nuit à été de 5 heures, la moyenne était de 3 heures. Je savais que ce serait dur… C’est épuisant, d’autant que j’essayais de couvrir 3 sports par jour.Cyclisme, triathlon, BMX, VTT, Kayak, judo, escrime, plongeon, Taekwondo, tennis de table, badminton, water polo, basket, handball, équitation, tir au pistolet, Ball-trap, gymnastique, athlétisme (le 100 et 200 mètres, tout simplement impressionnant) et Hockey sur gazon (j’ai adoré) sont les disciplines que j’ai couvert. J’ai regretté de ne pas avoir shooté du Beach volley (surtout féminin) tout comme la lutte et l’haltérophile. Mais il m’a fallu parfois faire des choix de timing, notamment les jours où j’avais des commandes et je ne pouvais couvrir qu’une seule discipline (ce qui était le cas lors du vtt, du Triathlon et du BMX notamment). Coté matos, c’est tout simplement impressionnant.
Chaque photographe travaille avec minimum 2 boitiers, mais souvent 3 ou 4… et parfois beaucoup plus. Les appareils télécommandés sont légions et les Pocket-Wizard sont partout. Les grosses agences avaient même des boitiers pilotés à distances via joystick et écran d’ordinateur. Pour info, pas de moyenne gamme, ils utilisaient des DX pour les Canonistes et des D4 pour les Nikonistes… soyons fou ! Je m’attendais en revanche à voir beaucoup de transmissions wifi en direct du boitier mais le standard (enfin toujours pour les grosses agences) était le câble Ethernet, puisque les boitiers Pro sont équipés de prises. Pour les photographes, les jeux laissent peu de marge de manœuvre. Il y a des emplacements photos où le premier arrivé est le premier servi pour les meilleures places. Et il vaut mieux éviter de sortir des zones photographes, sous peine d’un rappel à l’ordre immédiat. Seules les grandes agences mondiales ont les gilets bleus « Pool » qui leur donnent accès au plus proche de l’action. Frustrant… très frustrant. Les grosses agences disposent d’éditeurs et les photographes n’ont jusqu’ à s’occuper de shooter. Moi (comme beaucoup) j’avais 1à 2 heures d’éditing derrière chaque reportage.
J’ai terminé mes premiers JO, épuisé mais avec des images et des souvenirs plein la tète. J’ai réalisé mon rêve de photographe de sports en couvrant ceux de Londres. La proximité m’a fait tenter l’aventure olympique, et je m’étais dis que ce serait mes seuls jeux. Pourtant dans un coin de ma tète, je commence à regarder les cartes de Rio et pourquoi pas tenter une aventure hivernal dans deux ans du coté de Sotchy, d’autant que la procédure d’accréditation vient d’être lancé et la Dead line est au 4 octobre.”
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Rejoignez la discussion 6 commentaires
Hervé
Un témoignage vivant et vécut de l’intérieur très intéressant, merci.
Hervé.
ditesouistiti
Magnifique série! Je ne saurais laquelle choisir, elles sont toutes extra.
Thierry
Merci de vos commentaires.
Cocagne
Au vu des images l’accréditation n’a pas été volée…
Magnifique reportage dans le ventre de la bête !
Pingback:
29 novembre 2013 at 15 h 10 min
Conseil N°2: Vous avez choisi un reflex ? Lequel ? | imageos.fr
djerad
bonjour , et merci d’avoir partager cette experience avec nous .
un témoignage comme si on été et qui ouvre les portes des rêves …pourquoi pas
Merci